Un rêve de Phébus

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février 2007

Conversation avec des peluches

A ma droite, un paquet de copies, je suis en train de corriger la dernière ; à ma gauche, Le Monde plié en deux : « Nucléaire iranien : Chirac hésite et se contredit ». L’utilisation du simple patronyme sans M., ni prénom, ni « le président », indique que les fins limiers du quotidien du soir ne prévoient pas de nouvelle candidature du locataire de l’Elysée. Le président Chirac restera le président qui aura pratiqué avec le plus de constance, le plus de persévérance, l’hésitation et la contradiction. Une collègue m’a demandé ce matin si j’allais éteindre (...)

Non je ne mène pas une double vie

Dans son numéro de février, le magazine Technikart parle des vies virtuelles et des écrits sur l’internet. Je suis rassuré, ma situation n’est pas désespérée. Au restaurant, les familles (parents et enfants) ont souvent l’air de s’ennuyer, peu de conversations. Les nouveaux couples parlent davantage. J’y étais tout à l’heure avec un bon roman ; non je ne mène pas une double vie. Je n’en aurais d’ailleurs pas le temps. (...)

Nous n'étions pas du même côté de l'écran

Les fanions de l’anniversaire sont encore au dessus de ma tête, une banderole est accrochée au living. Nous avons fêté l’anniversaire d’A avec deux de ses copines, leurs parents et un petit frère. Un âge moyen pas très élevé chez les enfants. Parmi ses cadeaux, A a eu la joie de découvrir un tricycle, qu’elle n’a vu pour le moment qu’en pièces détachées. Elle ne le découvrira vraiment que demain très peu de temps après son réveil. Même les vélos sont vendus en kit. Avant-hier soir, j’ai eu la surprise de croiser David Lodge à la télévision (j’écris (...)

Un passé pourtant pas si lointain

Ce matin, le chat a montré son impatience (je ne devais pas aller assez vite pour remplir sa gamelle) en me gratifiant d’un coup de griffe. Il a ensuite filé dans l’ancienne chambre de ma sœur sous la menace d'un balai. Rouler près de 50 kilomètres pour finir par courser un chat dans un couloir avec un balai, il est des dimanches plus glorieux. J’ai ramené de ce périlleux déplacement des numéros du début des années 80 de l’hebdomadaire Les Nouvelles littéraires, mon préféré de l’époque. Je ne pense pas avoir trouvé mieux depuis. C’est amusant de se replonger dans (...)

Les Etats-Unis ont pourtant régulièrement cultivé l’excès

Préparatifs des bacs blancs, j’ai communiqué le programme des révisions aux collègues qui vont interroger mes élèves. Nous nous sommes mis d’accord sur quelques détails. Dans quelques semaines, avec l’une d’entre elles, nous échangerons nos rôles. Les oraux permettent de construire des réseaux. Je viens de terminer la Poursuite du bonheur de Douglas Kennedy ; un sens indéniable du récit et un contexte historique - la chasse aux sorcières aux Etats-Unis après la Seconde guerre mondiale - à son service. Certains contempteurs du président Bush semblent idéaliser les (...)

Plus un hasard qu'une volonté

L’avantage de ne pas avoir cours le mercredi est de vivre des semaines plus courtes : elles sont deux fois plus brèves mais sont deux fois plus nombreuses. Le jeudi et le vendredi, cette année, sont moins chargés que le lundi et le mardi. Ce soir, j’ai presque l’impression d’avoir terminé ma semaine. Nous avons choisi le prénom du futur petit dernier, c’est un prénom traditionnel, qui a beaucoup été porté dans ma famille. Mais c’est plus un hasard qu’une volonté. (...)

Etat bienveillant

J’ai dormi dans le train qui m’a emmené cet après-midi à Paris, puis dans celui du retour. L’idée de corriger des copies n’était pas assez séduisante pour m’empêcher de sombrer dans le sommeil du juste. Des écrivains comme Raphaël Juldé, Benoît Duteurtre ou en encore François Taillandier, protestent contre l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Ils ont raison dans la mesure où se développe de plus en plus cet Etat bienveillant redouté par Tocqueville. Mais le souvenir des salles des professeurs enfumées du commencement de ma carrière m’empêche (...)

La question essentielle du moment

Le Figaro d’aujourd’hui s’y met à son tour, il pose la question essentielle du moment : le roman français est-il malade ? Je préfère lire un bon roman que m’imposer ce genre de pensum. L’après-midi s’est terminé par un conseil de classe, qui a servi de transition avec le début de soirée. Nous avons remonté quelques bretelles mais rien de très grave, aucun élève n’étant en difficulté dans plus d’une discipline ou deux. A priori, tous passeront en terminale. (...)

Une autre personne, que pourtant j’étais

Ce soir, nous gardons le demi-frère de Nath, qui n’a d’yeux que pour Martine. J’ai dit à celle-ci que si nous n’attendions pas un bébé, cela nous donnerait envie d’en refaire un ; heureusement, dans un sens. J’ai retrouvé d’anciennes de mes lettres adressées à mes parents, les unes datant de 1975 (je séjournais à Leeds), les autres de 1985 (je jouais au militaire). Les lire m’a procuré des sensations curieuses, confirmation de souvenirs, redécouverte d’éléments du passé, comme s’il s’agissait d’une autre personne, que pourtant j’étais. De février (...)

Jus d'orange, café, cake aux olives et gâteau au chocolat

Je suis passé au lycée saluer les collègues qui interrogeaient mes élèves, oraux de bac blanc obligent. Il y avait du jus d’orange, du café, du vin, du cake aux olives et du gâteau au chocolat. Un professeur m’a expliqué dans la semaine que, pour lui, la victoire de Ségolène Royal serait quelque chose de pire que 1981. Je lui ai répondu que son succès, s'il avait lieu, m’amuserait, qu’il fallait prendre tout cela avec détachement. Il en a déduit que j’étais un chaud partisan de Ségolène. Il me l’a avoué dans une autre conversation. J’ai démenti. (...)

Ils lui tomberont tous dessus

Avec A, nous pratiquons une nouvelle activité : le ballon-copie. Je corrige les copies pendant que nous jouons au ballon. Je ne suis pas d’une efficacité redoutable mais on est multi-tâches ou on ne l’est pas, d’autant plus que j’écris ces lignes en même temps. A en profite pour boire un peu d’eau. Elle est maintenant couchée, pour le « grand dodo de la nuit ». Martine travaille sur son site. Mon paquet de copies a bien diminué, je pourrai les rendre demain. Cette semaine, deux de mes classes seront en stage en entreprise, l’autre en bac blanc à partir de mardi. Je (...)

Bonjour les amis

Hier, le jeu favori d’A consistait à prendre deux de ses personnages, à m’en donner deux autres et à les faire se rencontrer sur mon genou : Elle : bonjour les amis. Moi : bonjour les amis. Elle : vous avez bien dormi ? Moi : oui, et vous, vous avez bien dormi ? Elle ou moi : vous voulez danser ? Nous les faisions alors danser puis, très rapidement : « Bonjour les amis ». Nous aurions pu jouer ainsi pendant un très long moment. (...)

Trois romans et des Camarades

Lecture de trois romans en même temps, ce qui ne m’arrive quasiment jamais : Les Bienveillantes, qui m’occupe depuis quelques mois et que j’ai bientôt terminé, La tentation de l’après d’Emily Tanimura et La ballade de l’impossible d’Haruki Murakami, réédition du roman qui a révélé l’écrivain japonais. Voilà de quoi s’occuper pour cette période (cette semaine plus les vacances de février) qui s’annonce assez calme. Après avoir vu la semaine dernière la deuxième partie du téléfilm Les Camarades, j’ai regardé tout à l’heure la troisième et dernière. (...)

Une histoire de bandeau

Ce matin, j’ai entendu de la bouche d’un imitateur, à la fois à la mode et d’un grand talent, la meilleure blague concernant la Saint-Valentin, cette ignoble fête culpabilisatrice : pour la Saint-Valentin, j’ai fait comme pour le réveillon, j’ai envoyé le même sms à toute ma liste. J’ai terminé La tentation de l’après. Je n’ai toujours pas compris le sens du bandeau posé par Gallimard, proclamant ce roman comme étant « l’anti-Lolita ». On roule beaucoup dans les deux romans, mais la voiture ne sort que très peu de la ville dans celui d’Emily Tanimura. Je (...)

Une pique obligée

Si l’on en croit beaucoup de médias, le groupe Total est forcément coupable de la marée noire de l’Erika, puisqu’il a réalisé des profits records. Libération propose aujourd’hui dans son supplément littéraire un forcément bon article de Philippe Lançon sur Roger Martin du Gard et un autre, très bon aussi, sur Vassili Grossman, même s’il comprend une pique, obligée dans certains milieux, contre les Bienveillantes de Jonathan Littell. (...)

Démonstration

Vacances, 15 jours sans aller au lycée, avec un rythme qui va être moins intensif. Je n’écris pas ce que je prévois de faire pendant ces vacances, car je serais forcément déçu en me relisant après la reprise des cours. Ce soir, A ne voulait pas que je l’aide à manger son petit Filou, qu’elle ne se décidait pas à entamer. Je lui ai demandé : « tu veux que je te montre comment je ferais si je t’aidais ». Elle a été d’accord et j’ai pu faire durer la démonstration jusqu’à la fin de son dessert. (...)

Idéalisation

Un collègue de mon ancien lycée m’a fait remarquer cette semaine que j’avais un discours assez récurrent lorsque nous évoquions certains sujets. En fin de compte, je dois être un garçon assez cohérent. Je récuse par exemple toute idéalisation du passé, tout « avant c’était mieux ». Cette idéalisation est ancrée dans beaucoup d’esprits, même chez certains de mes écrivains préférés. (...)

Un tourniquet et un cheval à bascule de notre connaissance

Retour de promenade, quelques minutes avant l’heure du bain, Martine épluche des pommes de terre, A est affairée avec sa dînette. Nous avons profité du printemps naissant pour marcher un peu puis pour retrouver un tourniquet et un cheval à bascule de notre connaissance. Enrhumée, Martine est restée à la maison, elle en a profité pour confectionner la soupe qu’A apprécie tant. Les pommes de terre, c’est pour l’omelette de ce soir, qui devient une habitude le dimanche. Nous devons être en voie d’embourgeoisement. Francis Lalanne était chez Laurent Ruquier, hier soir à la (...)

Elle avance malgré tout car papa pousse

A a pu retrouver cet après-midi le plaisir de se promener sur son vélo, que Martine a pu réparer avec les pièces que j’ai récupérées ce matin. Dès la première utilisation, un écrou était tombé et la ceinture de sécurité avait cassé. A est encore un peu petite pour pédaler alors elle pose ses pieds en hauteur comme je le lui avais appris à faire avec son camion. Elle avance malgré tout car papa pousse. Le magazine Challenge fait un joli cadeau à ceux qui veulent en savoir un peu plus sur les bases théoriques de l’économie avec un dossier clair, sans tomber dans le (...)

Vélo

Un nouveau mystère, cette fois résolu : quand je pousse A sur son vélo, quand je lui dis de tourner son guidon, elle le lâche de sa main droite qu’elle pose ensuite sur son autre main. Le résultat est prévisible : le guidon ne tourne pas. Pourquoi fait-elle cela ? Parce que lorsque je lui fais tourner son guidon, je pose ma main sur sa main gauche. Elle fait la même chose. (...)

Une fable sur l'exercice du pouvoir

Pizzeria et cinéma avec ma fille aînée, nous sommes allés voir Le dernier roi d’Ecosse, à la fois un film qui décrit bien certains des maux de l’Afrique et une fable sur l’exercice du pouvoir, sur la relation entre un roi et son fou. Je me suis un peu promené sur Second Life, c’est très bien fait et amusant. Ce monde virtuel fonctionne selon les mêmes règles économiques que le nôtre, la loi de l’offre et de la demande. (...)

Le coq Agénor

Fin du repas d’A, un yoghourt mélangé à des morceaux de banane. En même temps qu’elle mange, elle n’arrête pas de parler. C’est le coq Agénor qui lui fait ouvrir la bouche et elle dit ensuite « merci madame », qu’elle répète plusieurs fois. Ce matin, en faisant les courses, j’ai éprouvé une sensation curieuse : je me suis dit « c’est bien, il n’y a pas trop de choses dans le caddy, je ne vais pas trop dépenser ni trop jouer au déménageur ». Puis j’ai continué à remplir le caddy, ai beaucoup dépensé et joué au déménageur. Entendu à la radio dans (...)

Le vote comme transaction entre un vendeur et un consommateur

Ce matin, alors que je sortais de la salle de bain en mettant mon pantalon (je suis un homme d’action, je ne peux envisager de rester en place pour l’enfiler), j’entends au loin « papa met son pantalon ». A avait repéré le bruit de la ceinture. On ne pourra bientôt plus rien lui cacher. Jamel cité par Ruquier : un électeur du front national, c’est un électeur communiste qui a été cambriolé deux fois. C’est un raccourci assez juste de la politique. On apprend dans le Monde daté d’aujourd’hui que Régis Debray est déçu par la campagne présidentielle : « le (...)

Reconnaissance

A était fatiguée ce soir, elle a eu besoin d’un long câlin avec sa maman avant d’aller dormir. J’ai envoyé dans la semaine une nouvelle chronique à la PL, plus dans l’esprit de ce que j’écris ici. Même si je ne suis guère physionomiste, je suis allé reconnaître le futur nouveau né à la mairie. Nous avons changé notre choix de prénom, revenant vers le premier que nous avions envisagé. Tu vois, Charlotte, heureusement que je ne te l’ai pas dévoilé. (...)

L'adopter plutôt que l'épouser

Dans le Journal du Dimanche (25 février 2007), on apprend que la compagne de Guy Marchand est « de quarante ans sa cadette ». « Marchand se demande encore s’il n’aurait pas dû « l’adopter » plutôt que l’épouser ». Hier soir, Martine s’est adressée au futur bébé en l’appelant par son prénom, ce qu’elle ne parvenait pas à faire jusqu’à présent. Le choix se confirme. A midi, le parrain d’A et sa femme sont venus déjeuner à la maison. A a été une nouvelle fois très gâtée et nous a fait rire en appelant son parrain « ton parrain ». (...)

Gardien de musée

Hier soir, les critiques du Masque et la Plume ont commencé leur conversation par « Comment parler des livres que l’on n’a pas lus » de Pierre Bayard. Ils n’ont bien entendu pas évité les bons mots forcément suscités par ce livre. Mais eux sont payés pour cela. Arnaud Viviant s’est ensuite moqué d’André Blanchard, l’auteur d’un « Contrebande », en déclarant que son livre était bien celui d’un gardien de musée, par nature conservateur (non, non, ce n’est pas une blague). Plus j’écoutais Viviant, plus j’avais envie de lire Blanchard, qui n’est pas (...)

Infréquentable

Juan Asensio publie dans son blog la partie essentielle d’un échange épistolaire avec Gabriel Matzneff. Pourtant, on a pu lire sur le net des propos très durs du premier contre le second. La littérature a le charme d’autoriser toutes les réconciliations. D’ailleurs, Gabriel Matzneff n’est-il pas un authentique écrivain infréquentable ? Conversation avec A, après la sieste, pendant que je change sa couche : Moi : Maman est partie faire des courses. A : Elle va apporter des ptits cadeaux. Moi : Des ptits cadeaux pour qui ? A : Pour A. Et elle ajoute : « Ben (...)

Gastronomie

A midi, nous nous sommes offerts une sortie dans un restaurant indien. Nous voulions le visiter depuis plusieurs années mais nous le trouvions trop près de chez nous. Nous avions plutôt projeté pour aujourd’hui un restaurant dans une petite ville ou un village, pour lier à la gastronomie le plaisir de la promenade. Mais le mauvais temps nous a poussé à renoncer à ce projet fou. Nous ne l’avons pas regretté. A plusieurs moments de la journée, Martine a cru que nous étions déjà dimanche. Pour la conforter dans son idée, j’ai confectionné pour ce soir une succulente omelette (...)